Situation de départ

Vigan est un exemple exceptionnellement intact et bien préservé de ville d’échanges européenne en Asie de l’Est et du Sud-Est. Son architecture reflète ses racines historiques et une culture riche, tant au niveau des matériaux que de la conception, qui mêle les modes de conception et de construction asiatiques à l’architecture et aux plans typiques du style colonial européen.

Néanmoins, avant son inscription sur la Liste du patrimoine mondial (en 1999), la valeur universelle exceptionnelle du site était gravement menacée. Seulement quatre ans auparavant, en 1995, le climat politique était un climat d’instabilité, d’armées privées et de violence politique, de délocalisation des entreprises, et de dégradation du quartier historique. Les industries traditionnelles étaient elles aussi en déclin, le marché public avait été détruit par un incendie, et les ressources étaient à peine suffisantes pour payer les salaires des fonctionnaires.

Quelles actions ont été entreprises ?

Les autorités et parties prenantes locales ont défini une vision claire et un plan d’action sur la base de leur candidature à la Liste du patrimoine mondial, en faisant de la conservation un outil de développement. Le plan s’est articulé autour de quatre objectifs.

Priorités stratégiques

• Renforcer le sentiment d’appartenance et la fierté des citoyens pour leur ville historique – accroître leur confiance et leur savoir.
• Intégrer cette démarche dans la politique et la gestion à long terme de la ville, de façon que les aléas politiques à court terme ne perturbent pas la dynamique.
• Forger des liens au plan local et international – apprendre d’autres villes historiques et assurer un soutien aux changements progressifs apportés par le Gouvernement espagnol dans le processus de planification principal, et collaborer avec les universités locales pour bénéficier de ressources et de capacités de recherche supplémentaires. De tels partenariats aident à obtenir des résultats lorsque les ressources sont limitées.
• Faire de la ville de Vigan une destination touristique qui enrichit et préserve les valeurs et traditions fondamentales de la population, tout en maintenant ses moyens de subsistance.

Qu’est-ce qui a fonctionné ?

La municipalité a investi dans un programme de recherche et d’éducation dans toute la ville. Ce programme mettait l’accent sur l’histoire, les traditions, les arts, la culture et l’artisanat et a pris la forme de  brochures, livres électroniques, films, lettres d’information, beaux livres, timbres de collection, manuels scolaires sur la ville à l’intention des enfants, d’un site Web pour les riverains et les visiteurs, et d’un soutien aux organisations communautaires. Les résidents et propriétaires ont reçu des directives en matière de conservation (sous forme d’un manuel publié chaque année) qui leur expliquaient comment user correctement des maisons et autres constructions ancestrales. Les panneaux indicateurs du quartier historique sont désormais fabriqués avec l’argile locale, ce qui en renforce le caractère pittoresque ; les bâtiments privés et publics ont été restaurés ; et l’administration a réservé 1 % du budget à l’investissement dans les arts, la culture et le tourisme.

La priorité a été donnée aux besoins de la collectivité – des mesures ont notamment été prises pour fournir l’eau potable aux villages, mettre en place des systèmes de traitement des déchets solides, mettre l’accent sur la santé et l’assainissement, et prévoir des routes vers les villages pour les rendre accessibles au tourisme et autres activités économiques. Les artisans chargés des travaux de préservation ont été formés et accrédités, et les artisanants traditionnels tels que la poterie et le tissage ont été intégrés aux programmes scolaires.

Une cartographie culturelle a été réalisée avec l’Université de Santo Tomas afin de savoir où porter les efforts de conservation et de mettre en évidence les lacunes dans l’offre faite aux touristes. On a ainsi pu déterminer qu’il serait bon de proposer de nouveaux produits et activités : promenade en bateau, musée pour enfants, complexe dédié à la conservation (abritant un centre de formation, un laboratoire de conservation, une bibliothèque de recherche, un entrepôt pour les matériaux nécessaires à la conservation, un centre de développement de produit, et des hébergements), et un parc à thème rural pour présenter la culture Ilocano. Cette cartographie a aussi mis en évidence qu’il fallait trouver de meilleurs moyens de faire visiter et comprendre le patrimoine de la ville aux touristes. La municipalité a donc créé six festivals pour renforcer leur expérience et multiplier les retombées positives pour la population locale, et les autorités locales ont créé un environnement où le secteur privé pourrait prospérer ; elles ont en outre développé toutes sortes d’autres attractions et services.

Quelles ont été les difficultés ?

Les mesures prises pour protéger le quartier historique n’ont pas toujours été plébiscitées par les propriétaires des résidents – en particulier les lois locales qui sont entrées en vigueur en matière de conservation et qui définissent les limites des zones historiques protégées et distinguent les zones clés des zones périphériques. Un Conseil pour la conservation a été créé en vue d’alléger la procédure d’obtention des permis de construire dans le quartier historique – les restrictions imposées à la gestion et à l’utilisation des biens immobiliers n’ont pas été très populaires dans les premiers temps.

Comment ont-elles été surmontées ?

La clé a été de s’occupper en priorité de ce dont la population avait le plus besoin – de meilleures routes, l’eau potable, des systèmes de traitement des déchets, des opportunités pour les entreprises, et une meilleure éducation. Il a aussi été important de concilier les besoins de la communauté (en particulier des plus pauvres) et la mise en place de l’infrastructure nécessaire au développement du tourisme.

Quels sont les résultats?

• Vigan est désormais une ville débordante d’activités, à l’économie en pleine croissance.
• Le nombre de visiteurs a beaucoup augmenté, passant de 76 000 en 2009 à 335 000 en 2012.
• Le taux de pauvreté a chuté, passant de 45,5 % en 1995 à 9 % en 2013.
• Les finances municipales se sont améliorées et le budget s’élève désormais à 292 millions de pesos (soit 27 millions de plus qu’en 1995).
• Les taux d’accès à la santé à l’éducation se sont nettement améliorés.
• La stratégie de redynamisation fondée sur le patrimoine de la ville a permis à la municipalité d’investir dans toute une série d’autres infrastructures pour les habitants, notamment : deux nouveaux lycées est une école élémentaire publics ; un nouveau marché public ; un abattoir ; une nouvelle station balnéaire ; l’accès à Internet pour de nombreux riverains de toute la ville ; des dispositifs de recyclage pour les déchets courants, le papier et le plastique ; un réseau de télévision pour la ville ; des programmes de formation à l’intention de 5 000 artisans ; et un programme de lutte contre la pauvreté.
• Des obstacles à la conservation subsistent, étant donné que toute ville en pleine évolution et économiquement prospère connaît des tensions concernant l’utilisation des bâtiments et espaces anciens – certains lieux restent délabrés et la densification de la circulation crée des problèmes.
• Une campagne a abouti en 2001 pour redonner à Vigan son statut de ville.
• La ville a aussi été reconnue par l’UNESCO comme un exemple de bonne pratique dans le domaine de la gestion des sites du patrimoine mondial en 2012.

Quels enseignements les autres peuvent-ils tirer de cette expérience?

Vigan a été transformée dans le cadre d’un processus qui a consisté à comprendre le potentiel touristique de son patrimoine, à mettre au point un plan d’action, et à exécuter ce plan d’action dans le respect d’une bonne gouvernance, en répondant aux besoins quotidiens et aux aspirations de la population, et en prenant très au sérieux le besoin de conservation très important du patrimoine historique.

Pour en savoir plus, visitez le site officiel de la ville de Vigan ou le site Web de l’UNESCO consacré au patrimoine mondial pour en savoir plus sur le choix des exemples de meilleures pratiques.