Guide 9 – Étude de cas : Terre de l’encens (Oman)

Situation de départ

Le site du patrimoine mondial Terre de l’encens se compose de quatre sites archéologiques liés au commerce, dans l’Antiquité, de l’encens et autres produits de luxe à travers la province du Dhofar (Oman) : Shisr (parfois appelé Wubar) ; Sumhuram ; Al Baleed et Ouadi Dawkah.

La Terre de l’encens a deux problèmes de gestion – les vestiges archéologiques, relativement étendus, demandent des capacités d’investigation, d’analyse et de conservation spécialisées ; toutes ces activités requièrent également un financement.

Quelles actions ont été entreprises?

La question de la conservation est essentielle à la préservation de la valeur universelle exceptionnelle des sites, et la Terre de l’encens a la chance de recevoir pour son entretien une contribution relativement généreuse du gouvernement. Un plan d’autofinancement a cependant été lancé pour faire en sorte que les efforts de conservation puissent continuer d’être financés, y compris au-delà de la contribution gouvernementale, l’objectif étant l’autosuffisance.

Pour permettre la conservation à long terme du site, l’Université Sultan Qaboos de Mascate (Oman) a développé une relation de coopération avec des instituts universitaires allemands en vue de proposer une formation à la conservation à des résidents Omanais. Les fonds supplémentaires, notamment pour la recherche et les fouilles en cours, ont également été levés par financement participatif.

Priorités stratégiques

  • Atteindre l'autonomie grâce aux revenus du tourisme.
  • Conserver les éléments et sites archéologiques représentatifs de la « Terre de l'encens » – les arbres à encens qui poussent dans la région, qui appartiennent eux aussi au patrimoine du commerce antique, sont à protéger.
  • Limiter les dégâts causés par les visiteurs aux éléments archéologiques.
  • Renforcer les capacités au niveau local, afin que les Omanais puissent mener les activités de conservation et autres activités spécialisées.
  • Poursuivre les recherches et les fouilles en cours sur le site pour améliorer les connaissances et l’éducation concernant le commerce de l'encens et autres produits de luxe dans la péninsule arabique.

Qu’est-ce qui a fonctionné?

Bien que le modèle de l'autofinancement n’est pas encore celui de l’autonomie, la stratégie représente tout de même un bon exemple en ce sens. Les droits d'entrée et les sommes générées par la vente de biens liés au site du patrimoine, à savoir l'encens, servent à financer le personnel du site et à contribuer à d'autres frais de conservation et d'entretien – le site n’est pas exploité pour le profit.

L’Université Sultan Qaboos de Mascate (SQU), l’Université d’Aix la Chapelle et le service d'échange universitaire allemand ont uni leurs forces pour mettre en place un programme d'études d'architecture à SQU - plus de quarante jeunes Omanais ont été formés dans les domaines de la conservation et de la gestion de sites. La formation de spécialistes locaux est plus durable à long terme car les sites peuvent compter sur des experts locaux, voire résidents, plutôt que de payer les honoraires de freelance étrangers, qui sont souvent élevés.

Le financement participatif a également été utilisé avec succès pour financer de nouvelles recherches et fouilles au Parc archéologique de Al Baleed. En 2013, une campagne a été lancée sur le site de financement participatif Indiegogo en vue de récolter des fonds pour l’achat des fournitures de terrain et de laboratoire pour les fouilles en cours. Près du double du montant nécessaire a été récolté : l'objectif était de 1 900 dollars des Etats-Unis, et un total de 3 350 dollars des Etats-Unis ont été recueillis. Un tel succès n’est évidemment pas garanti lorsque l’on recourt à un moyen reposant uniquement sur des dons du public, mais Al Baleed représente un exemple qui démontre la valeur potentielle de cette plate-forme d'investissement.

Quelles ont été les difficultés?

À l’évidence, mettre en place un système de financement autonome durable n’a pas été chose simple. Cela fait maintenant plus de 10 ans que des efforts ont été entrepris en ce sens et, bien que des progrès aient été accomplis, le site ne fonctionne pas encore en autofinancement. Il a par ailleurs été une gageure d’assurer la formation appropriée du personnel du site ; la nécessité de la conservation a déjà été mise en évidence, mais la gestion des visiteurs représente un élément tout aussi important dans le cas d’un site si vaste. Avec plus de 100 000 touristes annuels – un pic ayant été enregistré en 2008 à 480 000 visiteurs – la tâche va devenir de plus en plus difficile.

Comment ont-elles été surmontées?

La valeur archéologique indéniable de la Terre de l’encens, son attrait pour les touristes, et la nécessité d’assurer la conservation du site afin de garder intacte sa valeur universelle exceptionnelle sont les raisons principales qui motivent le gouvernement à fournir des fonds – ailleurs dans le monde, de tels critères peuvent attirer un financement ou un investissement privé. Offrir aux jeunes de nouvelles possibilités d’apprentissage et de carrière, et aux autres entreprises locales (par exemple dans le commerce de produits de l'encens et de la myrrhe) des possibilités de vendre à une clientèle plus vaste ont également joué un rôle dans le succès de ce site, qui ne se dément pas.

Quels ont été les résultats?

La Terre de l'encens attire deux principaux types de tourisme – le tourisme dit « du kharif », pendant la saison de la mousson, et le tourisme international. En 2011, le revenu provenant de ces deux formes de tourisme a été jugé suffisant pour couvrir les coûts de conservation des parcs archéologiques, et il a été considéré qu’il représentait une source majeure de revenus dans la région du Dhofar. Bien que l’on ne soit pas encore parvenu à l’autonomie, récolter suffisamment d’argent par le tourisme pour couvrir une part si importante des frais d'entretien du site représente une étape importante dont on peut se féliciter.

Avec l'aide d'experts internationaux, plus de 40 jeunes Omanais ont été formés à la conservation et à la gestion du site. Ce renforcement des capacités contribue également de manière significative à la viabilité à long terme du tourisme sur le site de la Terre de l'encens.

Quels enseignements les autres peuvent-ils tirer de cette expérience?

L'autonomie est le but ultime pour les sites du patrimoine mondial, bien que cet objectif puisse être plus difficile à atteindre pour certains – en particulier ceux qui ne disposent pas des équipements ou des capacités nécessaires pour accueillir les touristes. Cependant, tout site qui reçoit la visite d’un nombre constant de touristes payant des droits peut concevoir une stratégie d'autonomie, en fonction de facteurs tels que les coûts d'entretien, du personnel, de la sécurité, etc. Le site de la Terre de l'encens est par ailleurs un bon exemple pour montrer qu’aussi sûr soit un flux de financement, il est toujours bon de prévoir des solutions de rechange en cas de besoin.

Exemples de bonnes pratiques dans le monde

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